Les « nudges », ces petits coups de pouce censés guider nos comportements, sont partout.
On les voit dans les supermarchés, les applications mobiles et même les transports en commun.
Mais soyons honnêtes : combien de ces stratégies tiennent vraiment dans la durée ? La réponse est simple : très peu.
Pourquoi ? Parce qu’ils s’appuient sur la motivation extrinsèque, cette même motivation qui fait que, une fois l'effet initial dissipé, les gens reviennent à leurs habitudes initiales.
Prenons un exemple connu : Ă Stockholm (voir la vidĂ©o ci-dessous), des marches de mĂ©tro ont Ă©tĂ© transformĂ©es en touches de piano pour encourager les passants Ă prendre les escaliers au lieu de l'escalator. GĂ©nial, non ?Â
Sur le moment, plusieurs personnes jouent le jeu. Mais quelques jours plus tard, que s’est-il passé ? Ces gens sont retournés à leurs bonnes vieilles habitudes, reprenant l’escalator.
Pourquoi ? Parce que ce nudge misait sur la motivation extrinsèque, c’est-à -dire un élément extérieur et éphémère (ici, le côté ludique), plutôt que sur une vraie transformation intrinsèque.
Les nudges et la motivation extrinsèque
Là où la majorité des nudges échouent, c’est qu’ils déclenchent un comportement sans toucher aux vraies motivations de l'individu. Et tant que cette motivation reste extrinsèque, c'est-à -dire liée à une récompense ou un effet contextuel, le comportement ne tient pas.
Vous voyez le problème ? On change le décor, on met en place des artifices, mais le cœur du comportement, lui, reste inchangé.
Dès que l’excitation retombe, les gens reviennent à ce qui leur est le plus naturel, ou en tout cas le plus pratique. C’est le souci avec les nudges tels qu’ils sont conçus aujourd'hui : ils créent des changements superficiels, mais pas d’impact durable. Le comportement n'est pas ancré.
À Toronto, ils ont tenté une expérience similaire dans le métro. Ce qui est frappant, c’est que malgré le nudge, la majorité des gens empruntent quand même les escalators de manière quasi « automatique ».
Des nudges qui marchent ou feu de paille ?
Dans la plupart des nudges actuels, on mise sur des éléments comme la curiosité ou le plaisir immédiat, mais sans jamais vraiment transformer la manière dont la personne perçoit le comportement.
On est dans l’instantané, le one-shot. Et une fois que le stimulus (l'effet ludique, la récompense, le rappel visuel) est parti, on perd tout.
Et c’est là que la science comportementale nous éclaire : les comportements ancrés dans la motivation intrinsèque — des comportements que l’individu adopte parce qu’il en ressent lui-même les bénéfices à long terme — ont beaucoup plus de chances de tenir dans le temps.
Redéfinir les nudges en les ancrant dans la motivation intrinsèque
Alors, comment créer des nudges qui durent ? La clé est simple : faire passer la motivation intrinsèque avant l'extrinsèque.
Il ne suffit pas d’ajouter un élément amusant ou temporaire, il faut aider les gens à voir la valeur du comportement en lui-même.
En d’autres termes, on doit dépasser le nudge comme simple déclencheur pour en faire un vrai levier de transformation.
Voici quelques principes pour des nudges plus durables en entreprise :Â
Aligner les nudges sur les motivations intrinsèques
Si le comportement n’a pas de sens pour la personne, il ne tiendra pas.
Ne pas se contenter de déclencher des comportements, mais les faire perdurer
Le nudge peut initier un comportement, mais il doit être suivi par une vraie stratégie de soutien. Ça passe par des retours réguliers, des objectifs clairs et un sentiment de progression. Sans ce suivi, on ne fait que toucher la surface.
Favoriser l’appropriation
Pour que la motivation devienne intrinsèque, il faut que l’individu sente qu’il contrôle son comportement. Les nudges les plus efficaces sont ceux qui donnent aux gens les outils pour s’approprier le changement.
Le vrai dĂ©fi pour les entreprises, c’est d’aller au-delĂ de l’effet Ă©phĂ©mère des nudges et d’attaquer le cĹ“ur des problèmes de leurs cibles.Â
Qu’il s’agisse de clients, de collaborateurs, ou de partenaires, les comportements ne changent durablement que si on s'attaque à leurs motivations profondes, à leurs vrais besoins.
Si on ne fait que « nudger » pour corriger un comportement sans résoudre les véritables frustrations, tensions ou freins de la cible, l'impact restera limité.
Pour que le nudge fonctionne et soit durable, il doit ĂŞtre conçu dans une logique d’accompagnement Ă long terme, en aidant les individus Ă rĂ©soudre leurs propres problĂ©matiques plutĂ´t que de simplement les dĂ©tourner de leurs habitudes par des moyens superficiels.Â
En ancrant les comportements dans une compréhension plus fine des défis intrinsèques des cibles, on peut vraiment transformer la manière dont elles s’engagent — avec une marque, un produit, ou même un projet d’entreprise.