Le cerveau de Sapiens versus celui d' Homo Economicus. Alors que lâimposture du second se confirme, le premier mĂ©rite quâon redore son blason forgĂ© par 11.764 gĂ©nĂ©rations dâhumains.
MalgrĂ© les preuves scientifiques de « lâirrationalitĂ© » des clients et les couacs Ă©conomiques successifs que le monde a vĂ©cus, notamment la faillite de la banque dâinvestissement Lehman Brothers en 2008, le concept de « lâHomo-Ćconomicus » sĂ©vit toujours.
MĂȘme en disgrĂące, cette incarnation du dogme rationnel continue Ă exercer une certaine influence sur les pratiques et approches de la majoritĂ© des organisations.
âPourquoi personne nâa rien vu venir ?â a demandĂ© la reine dâAngleterre aux Ă©conomistes de la London School of Economics (LSE) aprĂšs la crise de 2007. Source : https://www.ft.com/content/50007754-ca35-11dd-93e5-000077b07658
En 2008, annĂ©e de crise majeure, la Reine dâAngleterre interpella les Ă©conomistes de la prestigieuse London School of Economics dâun cinglant : « Comment se fait-il que personne nâait rien vu venir ? ».
LâĂ©conomiste amĂ©ricain Paul Krugman rĂ©suma la situation en ces termes : « La science Ă©conomique a Ă©tĂ© au mieux spectaculairement inutile, au pire carrĂ©ment nocive ».
Nous ne sommes définitivement pas des « Homo Economicus », notion inventée de toutes piÚces, mais bien des «Homo-Sapiens ».
HĂ©las, sans rĂ©habiliter le fait que les origines de notre fonctionnement cĂ©rĂ©bral actuel remontent bien Ă plus de 300.000 ans et sans comprendre et changer les fondamentaux de « lâexpĂ©rience client », les mĂȘmes problĂšmes sont appelĂ©s Ă se rĂ©pĂ©ter.
Comme un virus façon Covid qui infecte une structure sociale ou une organisation,
« Homo Economicus » ne fait que muter.
MĂȘme si les faits forcent les organisations Ă considĂ©rer que « Homo-Ćconomicus » est bien un client fictionnel, un persona ayant perdu toute crĂ©dibilitĂ©, le virus utilise le mĂ©tabolisme et les constituants de lâentreprise pour se construire un variant et donc ne jamais totalement disparaĂźtre.
CamouflĂ© sous des termes sĂ©duisants comme « UX », « expĂ©rience client », « biais cognitifs », « moments dâenchantement », « convoquer les Ă©motions », ou sous couvert dâun « Net Promoter Score », le paradigme erronĂ© continue, peu ou prou, Ă sĂ©vir. Ce tour de passe-passe rassure les directions et les dispense dâĂ©voluer en profondeur.
Dans un article de 2011, la sociologue Nancy Howell de lâUniversitĂ© de Toronto a calculĂ© lâintervalle sĂ©parant deux gĂ©nĂ©rations de « Homo-Sapiens », et ce depuis 300.000 ans. La scientifique a Ă©valuĂ© une gĂ©nĂ©ration Ă 25,5 annĂ©es.
Un simple calcul nous permet donc dâestimer le nombre de gĂ©nĂ©rations de Sapiens jusquâĂ ce jour à ⊠11.764 !
Sur 11.764 gĂ©nĂ©rations, seules 2.6 ont Ă©tĂ© en contact rĂ©el avec le marketing.Â
Et seulement 1.3 gĂ©nĂ©ration dâĂȘtres humains manipulent massivement ordinateurs, tĂ©lĂ©phones mobile, cloud et autres bidules numĂ©riques âŠ
La confrontation du cerveau de « Homo-Sapiens » avec le marketing, lâe-commerce et Tik-Tok ne sâest donc faite que trĂšs, trĂšs, trĂšs tardivement comparĂ© aux gĂ©nĂ©rations de nos ancĂȘtres ayant usĂ© de leur cerveau en prioritĂ© pour survivre.
Parmi ces aĂŻeux, quel est dâaprĂšs vous le plus « proche » de nous ? Triple choice : lâĂ©leveur-ensemenceur ? le chasseur-cueilleur ? ou le butineur-Ă©lagueur ?
Conclusion
LâexpĂ©rience humaine, riche de 11.764 gĂ©nĂ©rations, tĂ©moigne de la complexitĂ© et de la profondeur du comportement de « Homo-Sapiens », bien Ă©loignĂ© de la figure simpliste de l' « Homo-Ćconomicus ».
Les récents échecs économiques et les mutations constantes de ce concept erroné mettent en lumiÚre la nécessité d'une évolution des pratiques en entreprise, vers une compréhension plus authentique et nuancée de l'expérience client.
Il est impératif de reconnaßtre la dimension irrationnelle, émotionnelle et profondément humaine des consommateurs pour répondre efficacement à leurs besoins réels et construire des relations durables.
L'heure est venue de délaisser les paradigmes obsolÚtes au profit d'approches qui prennent en compte la richesse et la diversité du comportement humain.
Questions à méditer
Comment pouvez-vous intégrer la compréhension profonde du comportement « Homo-Sapiens » dans la conception de produits qui résonnent véritablement avec les utilisateurs, au-delà des simples réactions aux stimuli de marketing ?
De quelle maniĂšre vos mĂ©thodologies de recherche peuvent-elles Ă©voluer pour mieux saisir la complexitĂ© des comportements humains et ainsi dĂ©passer les limites de lâ « Homo-Ćconomicus » dans l'analyse des besoins des utilisateurs ?