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🧠 Le dé(con)finement vu par les neurosciences

Qu'est-ce qui peux bien pousser les allemands à faire la file chez Ikea ? Privé de shopping durant des semaines, l’asservissement généralisé à la dopamine représente-t'il un risque majeur de danger sanitaire dans le dé(con)finement en Europe ?

Nous sommes en 1952, Peter Milner et James Olds, deux scientifiques canadiens, sont sur le point de découvrir le « système de la récompense » suite … à une erreur.

Milner, professeur à l’Université Mc Gill à Montréal, est connu dans le monde scientifique pour ses études sur les fonctions du cerveau. Il l’explore en implémentant des électrodes dans ceux de rats afin d’observer les variations de comportements des rongeurs causées par les décharges électriques de différentes intensités qu’il leur envoie. Olds, à l’époque, vient d’achever son doctorat en psychologie et décide de réaliser un cursus postdoctoral.

Ensemble, le duo va mettre au point, au département de psychologie de l’université québécoise, une expérience visant à amener des rats à éviter certains coins d’une cage en stimulant électriquement leurs cerveaux.

 L’expérience se passe selon les attentes du tandem. L’excitation d'un centre impliqué dans la vigilance, situé en arrière de l'hypothalamus, pousse tous les rats à s’écarter des coins. Tous les rats, sauf un ! Jack, lui, plutôt que de fuir les endroits synonymes de chocs électriques, y revient systématiquement.

Système de la récompense, Electric Jack

Olds, supposant que Jack était juste moins sensible aux décharges que ses congénères, en renforça la puissance. Le résultat fut étonnant. En effet, Jack, le réfractaire du groupe, revenait encore plus vite vers les coins.

Après plusieurs initiatives infructueuses, les deux scientifiques durent se rendre à l’évidence : au lieu d’éviter les coins à risques de l’enclos, Jack semblait rechercher les stimulations électriques en s’y rendant. Mais pourquoi ?

Même soumis à des chocs électriques plus intenses, le rat ne se décourageait pas. Certaines décharges étaient si intenses que Jack se trouvait littéralement propulsé contre les parois de la cage. Malgré ces chocs violents, dès qu’il reprenait conscience, l’animal se précipitait à nouveau pour se faire électrocuter.

Dérouté par ce comportement étrange et atypique, Olds passa le cerveau de Jack au Rayon X et découvrit que chez ce rat l’électrode avait été implantée par erreur dans un emplacement décalé d’à peine quelques millimètres par rapport à celui des autres rats. L’aire septale venait d’être découverte.

Système de la récompense, les aventuriers de l’aire septale

Suite aux résultats de cette première expérience, Olds décida d’en mener une seconde mais cette fois en implantant une électrode directement dans l’aire septale des cerveaux d’un nouveau groupe de rats. 

Il s’aperçut que maintenant tous les rats adoptaient le même comportement que celui de Jack. Dans la foulée, Olds eut une lumineuse idée qui fit encore progresser la connaissance du cerveau : équiper les cages d’un levier permettant aux rats de s’auto-administrer de faibles stimulations électriques en actionnant une simple pédale.

Comment allaient se comporter les petits rongeurs ? Les résultats ne se firent pas attendre, les rats pressaient le levier sans discontinuer. Avec une moyenne de 200 pressions à l’heure pendant 24 heures, certains rongeurs allaient jusqu’à 100 pressions en moins d’une minute.

Alors qu’elle ne résultait d’aucune activité sensorielle, ni d’aucun besoin, la stimulation électrique de l’aire septale fournissait une sorte de récompense absolue aux rats préférant continuer à appuyer sur la pédale au détriment de leurs besoins vitaux. Pour certains jusqu’à en mourir. 

Et si les Humains enfiler sur le parking Ikea préféraient recevoir une récompense au détriment d'assurer leurs besoins vitaux.

Homo-Sapiens prĂŞt Ă  mourir pour un meuble Ikea ?

Pour que Homo-Sapiens survive dans son environnement, l’évolution a doté son cerveau d’aires permettant de récompenser l’exécution de comportements de survie de l’espèce — comme manger, se défendre ou encore se reproduire — par une sensation agréable.

L’aire tegmentale ventrale (ATV), localisée au centre du cerveau agit comme une sorte cockpit de pilote recevant l’informations de nombreuses zones du cerveau qui vont l’informer sur le niveau de satisfaction des besoins de Homo-Sapiens. 

Les différents niveaux de satisfaction des besoins sont ensuite envoyés à d’autres zones du cerveau grâce à un neuromodulateur chimique, la dopamine, dont l’augmentation renforcera la répétition des comportements gratifiants en consolidant les traces nerveuses activées.

Dans nos vies quotidiennes, l’obtention d’une récompense directe produit dans nos cerveaux une hausse d’activité de l’ensemble des neurones producteurs de dopamine.

Avec l’apprentissage, le cerveau va mémoriser les modalités (lieu, objet, …) ayant généré ces récompenses pour ensuite lui permettre, à la seule évocation de ce souvenir, de prédire les récompenses liées à cette expérience.

Et tenez-vous bien, cette ingénierie comportementale régit pratiquement tous nos choix de comportements, captifs que nous sommes de notre biologie de fonctionnement.

Nous passons nos journées à passer de la recherche d’une récompense à une autre. Notre cerveau est câblé pour chercher les récompenses, les proies et éviter les désagréments, les prédateurs. Avec à l’arrivée, une nouvelle victoire triomphale de sa majesté limbique, le cerveau émotionnel. 

Apprivoiser intelligemment ce mécanisme de récompense

Activé auparavant de manière plus sporadique et sans excès, le neuro-modulateur du plaisir est aujourd’hui hypersollicité par un quotidien surstimulé. Sans nous en rendre compte consciemment, le corps en redemande sans cesse. Comme une drogue, sauf que la dopamine est un produit naturel secrété par chaque humain, gratuit, disponible en permanence, et instantanément, sans effort. Jusqu’à l’addiction !

Et si c'était ce mécanisme non-conscient qui poussait tous ces gens à faire la file devant un magasin Ikea en Allemagne pendant que des soignants mettent leurs vies en danger pour faire face à une épidémie mondiale ?

La responsabilité des entreprises à envisager avec précaution ce circuit de la récompense est énorme dans les choix qu’elles vont opérer à l'avenir.

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