Expérience client, soyez IN, IA pas le choix !
NoyĂ©e dans un ocĂ©an de data, cernĂ©e dâintelligence artificielle, lâespĂšce humaine est en passe de dĂ©crocher de la courbe de croissance technologique âŠ
La grande majoritĂ© dâentre nous ont dĂ©jĂ , et de plus en plus souvent, Ă©prouvĂ© ce sentiment dâĂȘtre dĂ©passĂ©, larguĂ©, impuissant face Ă lâexplosion des technologies. A la fois saturĂ© et bombardĂ© dâinformations venant de toutes parts.Â
Jusquâil y a trois ans, on estimait lâHumain encore capable de suivre et de sâadapter. Mais depuis, des Ă©tudes du MIT(1) ont posĂ© un constat sans appel : pour la premiĂšre fois dans lâhistoire de lâHumanitĂ©, la courbe dâĂ©volution technologique, devenue exponentielle, a dĂ©passĂ© la courbe dâadaptabilitĂ© de lâHumain et sâen Ă©carte de façon ascensionnelle. Le big bang technologique actuel dĂ©passe lâĂȘtre humain.Â
Homo-Sapiens est en plein décrochage.
(1) Media Lab hosted Human 2.0, " a symposium focused on ushering in a new era in human adaptabilityâan era where technology will merge with our bodies and our minds to forever change our concept of human capability."
Câen est trop !
Ce dĂ©phasage croissant est la cause du profond malaise des femmes et des hommes de plus en plus connectĂ©s mais se sentant paradoxalement⊠dĂ©connectĂ©s. Et oppressĂ©s par le « trop » : trop de processus, trop de courriels, trop de data, trop de nouvelles technologies, trop de changements organisationnels, trop de sollicitations, trop dâinformations, trop de marques, trop de produits tous azimuts, trop de vacarme marketing ⊠Avec, comme entĂȘtĂ©es lame de fond et turbine centrale de ce tsunami, les technologies en Ă©volution perpĂ©tuelle et accĂ©lĂ©rĂ©e.Â
Le monde dans lequel nous vivons donne des vertiges. DâaprĂšs Eric Gastfriends, jeune diplĂŽmĂ© de la Harvard Business School, 90% de tous les scientifiques ayant vĂ©cu sur Terre sont vivants aujourdâhui, il nây a jamais eu autant de doctorats, de publications scientifiques ou de dĂ©pĂŽts de brevets dans toute lâhistoire de lâHumanitĂ©, ⊠Regarder le nombre de produits et de services disponibles, de sĂ©ries tĂ©lĂ©visĂ©es, ⊠Et les donnĂ©es suivent les mĂȘmes tendances. LĂ , Ă quelques clics, sâempile une quantitĂ© infinie de savoir disponible instantanĂ©ment, emmagasinĂ©e juste pour vous. Nâattendant que dâĂȘtre consultĂ©e pour dĂ©livrer, comme par magie, la VĂ©ritĂ© ! Leurs vĂ©ritĂ©s ⊠façon puzzle ou rubikâs cube.
A titre dâexemple, vous ĂȘtes-vous dĂ©jĂ demandĂ© combien de courriels sont envoyĂ©s par jour dans le monde ? La rĂ©ponse est effarante. En 2020, en moyenne 306,4 milliards de courriels fusent chaque jour. Mais avec quel impact dans votre quotidien ?
Prenez quelques secondes et évaluez le nombre quotidien de courriels qui atterrissent dans votre boßte mail. 20, 50, plus de 75 ? Selon une analyse McKinsey, un employé passe 28% de sa journée de travail à lire et répondre aux courriels. Soit, en moyenne 120 messages reçus par jour et 2,6 heures consacrées à leur traitement par chaque employé qui, toujours en moyenne, vérifie ses courriels 15 fois par jour.
Entre les fusĂ©es technologiques, informationnelles et sociales qui sâĂ©lĂšvent ⊠et lâHumain les pieds sur terre, le dĂ©calage Ă©tait non seulement inĂ©vitable mais prĂ©visible.
En effet, le cerveau de Homo-Sapiens ne sâest pas créé en intĂ©grant la perspective de devoir un jour assimiler aussi vite une telle masse dâinformations.
EnvisagĂ© en millions dâannĂ©es dâĂ©volution, notre cerveau nâa juste biologiquement pas eu le temps de se modifier pour sâadapter Ă ce boum ⊠Ce qui pose la question de la pertinence de lâusage de « Big Data » comme aide Ă la dĂ©cision.
Les avancĂ©es technologiques de ces vingt derniĂšres annĂ©es ont permis Ă Homo-Sapiens de stocker et de consulter des quantitĂ©s gargantuesques de donnĂ©es. La magie numĂ©rique sortirait Ă la chaĂźne de son chapeau des rĂ©ponses statistiquement irrĂ©futables. De quoi satisfaire Ă bon compte des sociĂ©tĂ©s en perpĂ©tuel manque de temps et trop contentes de ne pas devoir se poser trop de questions. Tout en amplifiant le risque croissant et bien rĂ©el dâaveugler lâarbitrage humain.
Expérience client et boussole naturelle
Mais Homo-Sapiens ne dĂ©tient-il pas lâarme absolue pour garder la maĂźtrise de son adaptation ? Son « Intelligence Naturelle ».
Celle qui a, depuis des milliers dâannĂ©es, garanti sa survie.
Le rĂ©flexe n°4 « PrivilĂ©gier lâintelligence naturelle » permet de replacer ce discernement Humain au centre du jeu pour signifier aux donnĂ©es leur seul et vrai rĂŽle fonctionnel : informer lâHumain, mais sans plus.
La profusion de donnĂ©es est un danger lorsque celles-ci aveuglent les entreprises et occultent lâintelligence naturelle de Homo-Sapiens. Sans lâusage rĂ©gulier de celle-ci, hommes, femmes, employĂ©s ou clients sont condamnĂ©s Ă perdre lâessentiel de leur sens critique.
Vous doutez ? Saviez-vous quâau VIIIe siĂšcle avant J.-C., lâEgypte a Ă©tĂ© dominĂ©e par les Pharaons Noirs, les rois kouchites ?
2.700 ans plus tard, dĂ©but du XXe siĂšcle, George Andrew Reisner, Ă©gyptologue amĂ©ricain, arrive au Soudan oĂč il dirige une expĂ©dition visant Ă Ă©tudier ces pharaons mĂ©connus. AprĂšs avoir fouillĂ© les tumuli et les pyramides, il dĂ©couvre dans le village de El-Kurru quelques vestiges dâhabitation, plusieurs temples, un mur dâenceinte, des fortifications, ⊠quâil dessine avec prĂ©cision dans ses carnets de voyage en omettant un dĂ©tail ⊠de taille : lâemplacement des prĂ©cieux vestiges.Â
Plus dâun siĂšcle plus tard, en 2006, le Dr Geoff Emberling, archĂ©ologue Ă lâUniversitĂ© du Michigan, arrive au Soudan pour retrouver les antiques zones de vie du peuple kouchite. Mais comment les retrouver sans les prĂ©cieuses donnĂ©es de localisation manquantes dans les dessins du professeur Reisner ?
Pour tenter de repĂ©rer les vestiges, il fallait des donnĂ©es. Beaucoup de donnĂ©es. Le rĂ©flexe de Emberling fut donc dâutiliser les derniĂšres technologies dâimagerie satellitaires ainsi que des camĂ©ras multispectrales de pointe permettant dâidentifier avec prĂ©cision les propriĂ©tĂ©s de rĂ©flexion de la surface dâun objet. La signature spectrale Ă©tant diffĂ©rente dâun matĂ©riau Ă lâautre, cette technique a la capacitĂ© de rĂ©vĂ©ler des vestiges enfouis, Ă©pargnant des mois, voire des annĂ©es de fouilles au petit bonheur la chance. Au vu des techniques sophistiquĂ©es utilisĂ©es, lâarchĂ©ologue amĂ©ricain Ă©tait trĂšs confiant sur le fait de localiser les prĂ©cieux vestiges. Si la quantitĂ© de donnĂ©es rĂ©coltĂ©es fut gigantesque, point de vestige Ă se mettre sous la loupe. DĂ©couragĂ©s, Emberling et son Ă©quipe se dirent que si ils nâavaient pas rĂ©ussi avec cette technologie-lĂ , ils ne trouveraient jamais ce quâils cherchaient.
Trop de données tue la décision
Hassan, un ancien du village, passant tous les jours devant les fouilles fut intriguĂ© par la prĂ©sence de ces hommes et de leur matĂ©riel bizarre. Apprenant dâun villageois que lâĂ©quipe cherchait en fait des ruines, un jour, Hassan sâapprocha dâeux et dessina avec prĂ©cision sur le sable une forme complexe en demandant calmement Ă Emberling : « Est-ce quelque chose comme cela que vous cherchez ? ».
Incroyable ! Hassan venait de reproduire lĂ devant ses yeux la copie exacte du dessin dâun puits, taillĂ© dans la roche avec des escaliers, dessinĂ© un siĂšcle plus tĂŽt par le professeur Reisner dans un de ses carnets. Le vieux Soudanais tendit le doigt vers une zone et dit: « Câest juste lĂ -bas, regardez bien, vous trouverez ». Et il avait raison.
Lâhistoire vĂ©ridique de Hassan et Emberling pourrait faire lâobjet dâune fable moderne de La Fontaine dont la morale serait : « Si trop de donnĂ©es tu as, fais attention Ă ce que ton raisonnement, anesthĂ©siĂ© ne soit pas ».
Comme le souligne la techno-sociologue turque Zeynep TĂŒfekçi : « Pour les individus, ĂȘtre confrontĂ©s Ă un dĂ©luge de donnĂ©es devient un vrai problĂšme ». Il survient lorsque, par croyance ou manque de sens critique, nous abandonnons tout raisonnement et prenons les donnĂ©es pour vĂ©ritĂ©. Les data, big ou pas, sont dangereuses si lâanalyse humaine nâest pas lĂ pour leur donner du sens.
A bien regarder lâĂ©volution actuelle, des processus de dĂ©responsabilisation des gens et des collaborateurs sont partout Ă lâĆuvre. La nouvelle « diva techno » gĂ©nĂšre des milliards de data que les dĂ©partements UX et CX ont fortement tendance Ă gober tout cru. Souvent sans les remettre en question ou, a minima, les corrĂ©ler avec dâautres donnĂ©es.
Pourtant, voilĂ ces entreprises toutes contentes et convaincues dâenfin dĂ©tenir des rĂ©ponses a priori validĂ©es par des tombereaux de donnĂ©es. Des escouades de managers et spĂ©cialistes soufflent de soulagement face Ă cette manne inouĂŻe dâinformations. « Plus besoin de sâattarder sur les deux boules de droite, nous avons des Data ! » devient le mantra Ă la mode.
Et, cerise sur le gĂąteau numĂ©rique, la fĂ©e « Intelligence Artificielle » va, comme une grande, auto-apprendre et dĂ©charger lâHumain dâun tas de corvĂ©es. Câest NoĂ«l au pays dâun certain CX. Nul besoin de rĂ©flĂ©chir plus loin que le bout du nez de sa souris âŠ
HĂ©, les gars, dĂ©branchez et revenez Ă la rĂ©alitĂ©. Votre nouvelle Ă©gĂ©rie des temps digitaux, l'IA, doit plus que jamais ĂȘtre considĂ©rĂ©e avec prudence.
De la DonnĂ©e Ă lâIntelligence Naturelle
Loin de moi lâintention dâenvoyer les « Big Data » aux oubliettes informatiques mais bien de remettre les donnĂ©es Ă leur juste place dans toute sĂ©quence dâanalyse porteuse de rĂ©sultats. Le rĂ©flexe n°4 « PrivilĂ©gier lâintelligence naturelle » vise en prioritĂ© Ă ne pas se cacher derriĂšre des donnĂ©es mais Ă aller avant tout au contact des clients. Puis dâessayer de comprendre ce que leur cerveau cache derriĂšre leurs verbalisations. Au-delĂ du « Le client a dit que ⊠», commandez des Ă©tudes, des nouvelles datas, de lâIA pour valider verbatims et autres donnĂ©es subjectives recueillies. Surtout, Ă toutes les Ă©tapes, utilisez lâintelligence humaine naturelle comme boussole.
Voici un graphique dĂ©taillant les 5 Ă©tapes successives utilisĂ©es par mon Ă©quipe allant de la (ou les) donnĂ©e(s), jusquâĂ lâintelligence naturelle.
La premiĂšre Ă©tape consiste Ă rĂ©colter les donnĂ©es capables de nourrir la comprĂ©hension et de produire des analyses riches et porteuses de sens. PlutĂŽt que de viser une exhaustivitĂ© des donnĂ©es â sans avoir le temps matĂ©riel de toutes les analyser, ou Ă lâopposĂ© de nâavoir que quelques pauvres donnĂ©es (le cas le plus frĂ©quent dans les projets UX/CX) â, lâidĂ©e est de rechercher, telles les piĂšces dâun puzzle â « Ă©nigme » en anglais â seulement les data essentielles pour comprendre et Ă©clairer les comportements que vous souhaitez concevoir.
« Mais, le principe dâun puzzle Ă©tant de reproduire le dessin qui est sur la boĂźte et non un dessin sorti tout droit de mon imagination, comment puis-je rĂ©soudre le puzzle si je nâai aucune idĂ©e du dessin final ? », me direz-vous avec raison.Â
Excellente question puisque le principe-mĂȘme de transformer de la donnĂ©e en intelligence naturelle signifie que vous nâavez pas une idĂ©e prĂ©-conçue du comportement que vous cherchez Ă analyser.
Si lâimage finale du puzzle nâapparaĂźtra quâune fois les donnĂ©es rassemblĂ©es, la bonne nouvelle est que grĂące au quatre-quarts comportemental du rĂ©flexe n°3 vous connaissez dĂ©jĂ les types de piĂšces Ă chercher. Commencez donc par chercher les piĂšces de lâexĂ©cution du comportement, ce sont les plus faciles Ă observer et repĂ©rer. Vous savez, celles avec un bord droit qui formeront le cadre du puzzle.
Vous pourrez ensuite progresser vers lâintĂ©rieur du puzzle pour composer une image de plus en plus prĂ©cise. A cette fin, regroupez ensuite les piĂšces des 3 autres Ă©tapes dâun comportement : dâabord, les piĂšces de lâĂ©valuation et mĂ©morisation du comportement ; ensuite celles de la prĂ©fĂ©rence du comportement ; enfin, pour terminer au cĆur de lâimage, les piĂšces qui font battre le comportement et en sont lâorigine : celles de la naissance du comportement.
Guide du puzzle de l'expérience client : combien de piÚces et pour quel ùge ?
Il est Ă©vident quâavec un puzzle de seulement 4 Ă 5 piĂšces, je ne pourrai pas disposer dâune image claire du comportement des clients, comme le dĂ©taille un guide du puzzle pour parents dont je ne rĂ©siste pas Ă vous partager les conseils : « A partir de 18 mois : des puzzles Ă encastrement en bois de 2 Ă 5 piĂšces. Attention cependant : Ă cet Ăąge, les enfants mettent encore les objets Ă la bouche. Il faut donc privilĂ©gier des puzzles en bois ou des cubes avec de grosses piĂšces impossibles Ă avaler ». Vu le nombre de personnes qui avalent les donnĂ©es sans sâen rendre compte, il semblerait que le conseil reste trĂšs judicieux mĂȘme pour les adultes.
Cela me rappelle une mission sur laquelle la direction marketing stratĂ©gique dâun grand groupe dâassurance avait sollicitĂ© mon Ă©quipe. Voici le contexte. LâĂ©quipe CX travaillait sur un produit stratĂ©gique pour le groupe : la crĂ©ation dâun produit dâĂ©pargne-pension.
La cible identifiĂ©e Ă©tait les cadres cinquantenaires. On nous prĂ©senta un joli schĂ©ma sur un slide PowerPoint avec les 5 phases par lesquelles le client est censĂ© passer. DiffĂ©rentes courbes traduisant lâĂ©tat Ă©motionnel ainsi que les pensĂ©es du client Ă chaque Ă©tape traversaient le schĂ©ma de part en part. Idem phase aprĂšs phase. Le tout Ă©gayĂ© de petits smileys. Vous savez, les Customer Experience Map.
Lorsque je demanda Ă voir les donnĂ©es du « puzzle de vie des clients » ayant servi de base pour rĂ©sumer lâexpĂ©rience Ă un slide PowerPoint, je reçu un livrable synthĂ©tisant les Ă©changes rĂ©alisĂ© lors dâun « Focus Group », vous savez ces sĂ©ances dans lesquelles on demande Ă une dizaine de clients de verbaliser leur avis sur toutes une sĂ©rie de questions. De nombreuses Ă©tudes scientifiques prouvent que les rĂ©sultats des « Focus Group » ne sont pas gĂ©nĂ©ralisables, que les donnĂ©es collectĂ©es ne sont pas reprĂ©sentatives de lâensemble du groupe, que les rĂ©pondants donnent souvent des rĂ©ponses socialement dĂ©sirables, ⊠mais la technique est simple Ă mettre en Ćuvre et comme les clients sont rationnels, ⊠Par manque de connaissances sur le cerveau humain, les entreprises continuent dâutiliser cette technique, pensant que les clients sont en capacitĂ© dâexprimer les activitĂ©s cĂ©rĂ©brales non-conscientes qui composent 95% de leurs comportements dans la vraie vie.
Jâavais devant moi une image du « puzzle de vie des clients » contenant entre 10 et 20 piĂšces, comme les puzzles proposĂ©s aux enfants « dĂšs 2 ans ». Et lâentreprise allait prendre des dĂ©cisions sur base de ces maigres informations, sans aucune idĂ©e des expĂ©riences anticipĂ©es et effectives des clients cibles. Comment arriver Ă une zone de convergence entre les objectifs de lâentreprise et les besoins rĂ©els des clients ?
Cela me fait penser que jâai oubliĂ© de vous dire que la rĂ©union se passait Ă un Ă©tage spĂ©cialement amĂ©nagĂ© pour lâinnovation et lâexpĂ©rience client. La salle de rĂ©union Ă©tait Ă©quipĂ©e de sofas, de poufs, de tables hautes, de tapis de dĂ©coration, dâun vrai salon comme Ă la maison, dâun baby-foot, dâune machine Nespresso, ⊠Et pour arriver Ă cette salle, nous passions devant une magnifique « Data Room » digne dâun sous-marin nuclĂ©aire avec 5 Ă©crans 85 pouces 4K Ultra-HD remplis de courbes et de donnĂ©es analytiques. Ăa câest de lâexpĂ©rience client ! Lâentreprise avait, pour sĂ»r, travaillĂ© lâavoir : avoir des experts UX, avoir des locaux chaleureux, avoir des techniques « Focus-Group » pour alimenter un « Design Sprint », avoir une « Data Room » mais ⊠bien loin dâĂȘtre « expĂ©rience client ».
Une réflexion qui fait pouf
Je vois de plus en plus dâentreprises qui possĂšdent des lieux dâinnovations, dans lesquelles des Ă©crans Ă la Bloomberg affichent en temps rĂ©el une flopĂ©e dâindicateurs rĂ©servĂ©s aux puzzler experts. Elles ont des « Data-Scientist », ceux qui vous plient un puzzle de 5.000 piĂšces, les doigts dans le nez (ce qui, ma foi, relĂšve du double exploit).
Si trop dâinformations tue la dĂ©cision, alors quel est le nombre idĂ©al de piĂšces pour obtenir une bonne vision de lâimage finale ? La seule indication que je peux vous donner est que lorsque mon Ă©quipe travaille sur des sujets, entre 300 et 500 donnĂ©es sont identifiĂ©es. Cela fait de nous des puzzlers entraĂźnĂ©s mais sans plus. Et lorsquâune donnĂ©e est identifiĂ©e comme pertinente, si elle nâest pas corrĂ©lĂ©e par au minimum trois sources diffĂ©rentes, nous ne la gardons pas.
Au fil de lâanalyse, les donnĂ©es se muent en contenus. ConsidĂ©rer isolĂ©ment, une piĂšce d'un puzzle ne veut rien dire ; connectez-la Ă l'une de ses voisines et la piĂšce disparaĂźt, cesse d'exister en tant que piĂšce, les deux piĂšces miraculeusement rĂ©unies n'en font plus qu'une.
En avançant, vous finissez par voir l'image du quatre-quarts comportemental prendre forme. Les contenus deviennent des informations qui elles-mĂȘmes se transforment en connaissances finalement analysĂ©es et passĂ©es au tamis de lâintelligence naturelle. Les nouvelles technologies ont Ă©videmment leur rĂŽle de facilitateur Ă jouer dans ce processus mais au bout, le monopole de lâintelligence, ne peut en aucun cas ĂȘtre laissĂ© aux machines. On parle dâHumain, dâexpĂ©rience que le client va vivre. Pas de statistiques dĂ©sincarnĂ©es.
Seul le cerveau humain est capable dâassembler convenablement toutes les piĂšces/donnĂ©es liĂ©es Ă lâexpĂ©rience client. Sâen remettre entiĂšrement aux donnĂ©es, câest revenir Ă la narcissique vitre sans tain oĂč lâentreprise sâĂ©claire elle-mĂȘme sans Ă©clairer ses clients. « LâIntelligence Artificielle nâexiste pas » souligne Luc Julia, un des inventeurs de Siri, dans son livre. Il faut Ă un moment pouvoir se dire « Stop, jâai assez de donnĂ©es ». Cette dĂ©cision, aucun systĂšme informatique intelligent nâest capable de la prendre. RĂ©ussir son expĂ©rience client est une question de bon sens ⊠Humain.
ExpĂ©rience client â RĂ©flexe 4. PrivilĂ©gier lâintelligence naturelle.
Dans le cadre de lâextension de son dispositif digital, lâentreprise belge du groupe mondial de distribution de matĂ©riel Ă©lectrique dĂ©jĂ Ă©voquĂ©, demanda Ă mon Ă©quipe de dĂ©velopper une application mobile Ă mĂȘme de rĂ©pondre Ă des objectifs business prĂ©cis (et confidentiels) par la fourniture de la meilleure expĂ©rience digitale que le client ait jamais vĂ©cue.
En appliquant les 3 premiers rĂ©flexes, nous avons commencer par nous concentrer sur le puzzle de vie des clients afin de rassembler suffisamment de donnĂ©es sur lâexpĂ©rience anticipĂ©e et lâexpĂ©rience effective des Ă©lectriciens en mobilitĂ© :
- De quoi est composĂ© leur quatre-quarts comportemental quotidien ?Â
- Quels sont les contextes rĂ©els dans lesquels les Ă©lectriciens Ă©voluent chaque jour ?Â
- Quels dĂ©clencheurs intrinsĂšques et extrinsĂšques initient des comportements auxquels lâapplication pourrait rĂ©pondre ?Â
- Quel est la motivation psychologique de base et les expĂ©riences mĂ©morisĂ©es lors des comportements quotidiens ?Â
- Y-a-tâil chez les Ă©lectriciens installateurs un niveau de tension, dâimpatience ou dâobligation dans la journĂ©e ?Â
- Quels sont les comportements frĂ©quents et ceux plus occasionnels ?Â
- Quels sont les niveaux de rĂ©compenses anticipĂ©es envers chacun de ces comportements ?Â
- Quelles sont les perceptions des clients sur la probabilitĂ© dâefforts Ă dĂ©ployer et de dĂ©lai Ă attendre pour obtenir une rĂ©compense ?
- âŠ
Nous avons aussi investiguer les ressources mentales disponibles durant la journĂ©e dâun Ă©lectricien, son niveau de confiance, sa ligne de moindre rĂ©sistance, ses comportements lors de mise en compĂ©tition, ses routines, ses Ă©vĂ©nements biographiques, ses connaissances thĂ©oriques, ses lieux dâactivitĂ©, ses normes de conditionnement social, ses opinions et jugements pouvant reflĂ©ter son conditionnement Ă©motionnel, ses stĂ©rĂ©otypes de groupe menant aux conditionnements sociaux, ses critĂšres de dĂ©cisions, ses compĂ©tences, âŠÂ
Pour rĂ©unir ces donnĂ©es, nous avons vĂ©cu le quotidien de nombreux Ă©lectriciens, du matin trĂšs tĂŽt, de lâenlĂšvement de la marchandise jusquâĂ la vie sur chantiers, jusquâĂ parfois trĂšs tard âŠ
Nous avons observĂ© des centaines de comportements diffĂ©rents, analyser les verbatims spontanĂ©s, le vocabulaire utilisĂ©. Nous avons pu voir lâimpact business et Ă©motionnel quand un produit manquant les empĂȘchaient de travailler. Nous avons observĂ© de prĂšs leurs diffĂ©rents niveaux dâorganisations, lâagencement de leurs camionnettes tout autant que leurs comportements en agence et lors dâĂ©tablissement de devis chez de nouveaux clients.Â
Le tout pour Ă©tablir un portrait robot de la journĂ©e type, heure par heure, dont les piĂšces du puzzle tenaient en donnĂ©es comportementales, photos, analyses sĂ©mantiques des verbatims, informations horaires, ⊠Nous avons complĂ©tĂ© ces donnĂ©es par des recherches bibliographiques dont des recherches en neurosciences sur les notions dâurgence, de commandes en situation de mobilitĂ©, âŠ
Nous avons ensuite croisĂ© les donnĂ©es qualitatives avec des donnĂ©es quantitatives, pour complĂ©ter les hypothĂšses comportementales prĂ©cises sur les heures de connexions, le temps des connexions, les personnes qui passent les commandes, le dĂ©lai entre un chantier et la commande du matĂ©riel, le nombre de produits achetĂ©s, la maniĂšre dont les Ă©lectriciens acquiĂšrent de nouvelles compĂ©tences, le mode de livraison choisi, âŠ
En suivant les 5 Ă©tapes vers lâintelligence naturelle, nous avons composĂ© avec prĂ©cision un puzzle de vie du client Ă partir duquel nous avons pu Ă©tablir les principes comportementaux sur lesquels articuler la nouvelle application.
Nous disposions dâune vue transparente des 4 Ă©tapes des diffĂ©rents comportements. Nous avions face Ă nous les composants de la naissance des diffĂ©rents comportements, les raisons poussant la prĂ©fĂ©rence dâun comportement par rapport Ă un autre, nous savions comment Ă©taient exĂ©cutĂ©s les comportements actuels. GrĂące Ă ce puzzle de vie des clients, nous avons pu isoler toute une sĂ©rie de pistes innovantes collant Ă des comportements bien rĂ©els et encore non adressĂ©s par le marchĂ©.
A ce stade du projet, en accord avec le rĂ©flexe n°3 « Concevoir des comportements, pas des objets », toujours aucun Ă©cran Ă lâhorizon. Nous nous en fichions. Seule lâidentification des comportements Ă gĂ©nĂ©rer comptait. Car eux seuls peuvent alimenter la vision de lâexpĂ©rience et ensuite guider le dĂ©ploiement de lâexpĂ©rience. Lâapplication est aujourdâhui sortie et rencontre un franc succĂšs.
Le rĂ©flexe n°4 « PrivilĂ©gier lâintelligence naturelle » invite les entreprises Ă ne pas se cacher derriĂšre des donnĂ©es mais Ă Â aller en prioritĂ© au contact de ses clients pour rĂ©colter les donnĂ©es nĂ©cessaires, ni trop, ni trop peu, et surtout comprendre ce que les gens vivent dans leur quotidien. Au-delĂ de la verbalisation et du « le client a dit que », Ă toutes les Ă©tapes, utilisez votre intelligence humaine naturelle comme boussole.
Lead & Human Centered Digital Transformation & Innovation
« Une expertise qui remonte aux véritables fondements des comportements humains »
Marc est un expert haut de gamme dans le domaine de la stratégie comportementale appliquée à la conception d'interfaces utilisateurs. Marc a construit une grande expertise technique qui remonte aux véritables fondements des comportements humains devant une interface.
Tout le monde peut participer Ă la conception dâexpĂ©rience client positive en travaillant avec quelques bons rĂ©flexes.
Il sâagit bien plus dâun état dâesprit Ă retrouver en re-dĂ©veloppant le savoir-ĂȘtre, avant le savoir ou le savoir-faire. Une fois cette culture initiĂ©e, les techniques prennent tout leur sens.
De mes missions de terrain durant plus de deux dĂ©cennies, jâai dĂ©gagĂ© 9 rĂ©flexes que toute entreprise peut adopter pour gĂ©rer l'expĂ©rience client. Et cela, Ă son rythme, dans lâordre qui lui convient, en fonction de ses besoins et capacitĂ©s. Non pas pour faire dâun coup la rĂ©volution mais sâoffrir les Ă©volutions nĂ©cessaires menant Ă dĂ©livrer une expĂ©rience client digne de ce nom.