En expérience client, tous les chemins mènent à Rome … enfin, presque !
Le mix « environnement - demande des clients - évolution technologique » dans lequel évoluent les entreprises ne cesse de se complexifier et de s’accélérer.
Face à ces changements de plus en plus rapide, l’entreprise moderne a hélas répondu à la complexité par la complication.
De nouveaux départements ont été ajoutés. Dernièrement ceux estampillés « Expérience client » et « Bonheur au Travail » sont apparus.
Partout, la même réponse pour amortir les nouveaux défis : ajouter et multiplier les nouveaux processus pour contrôler l’ajout de nouvelles ressources, elles-mêmes supervisées par l’ajout de davantage de managers, …
MCM (UX) (CX)
Faire le distinguo entre la numération romaine et la numération arabe est un excellent moyen pour comprendre cette complication. Prêt ? Vous pouvez compter sur moi pour vous déchiffrer ce parallèle de haut vol.
Alors que la numération romaine ne contient que 7 symboles très faciles à apprendre (I, V, X, L, C, D & M), pour simplement écrire 1999 il est cependant nécessaire d’appliquer de nombreuses règles pour obtenir :
- un magnifique « **MDCCCCLXXXXVIIII** » (1000 + 500 + 100 + 100 +100 + 100 + 50 + 10 + 10 + 10 + 10 + 5 + 1 + 1 + 1 + 1)
- ou un rutilant « **MCMXCVIIII** » (1000 – 100 + 1000 – 10 + 100 + 5 + 1 + 1 + 1 + 1)
- et dans le meilleur des cas un superbe « **MCMXCIX** » (1000 -100 + 1000 – 10 + 100 – 1 + 10).
Dans l’univers de l’expérience client ou collaborateur les légions d’experts en numération romaine accumulent techniques, processus, règles, méthodes, … afin de créer en priorité des objets. Les moteurs de recherche AltaVista, Infoseek, Yahoo! et Lycos sont de bons exemples de résultats de cette stratégie : ajouter, ajouter, ajouter. Nous connaissons tous le résultat de ces Empires.
A l’inverse, la numération arabe, plutôt que d’ajouter des règles de plus en plus complexes, propose à ses experts d’apprendre 10 symboles de base et à partir de ceux-ci de répondre à des défis Humains en se posant les bonnes questions. Dans le cas de 1999 les questions sont très simples :
- Combien de milliers ? Réponse : 1
- Combien de centaines ? Réponse : 9
- Combien de dizaines ? Réponse : 9
- Combien d’unités ? Réponse : 9
Dans le monde de l’expérience client, les experts en numération arabe concentrent leur attention sur la connaissance du cerveau humain et recomposent à l’infini les 10 symboles sous forme de solutions simples dont l’essentiel est de générer les comportements attendus, et pas des objets.
Par la connaissance de ces fondamentaux, tels que les chiffres 0 à 9, ils abordent les défis d’un environnement socio-économique qui change sans compliquer les expériences à y vivre.
Google est l’exemple parfait de l’application de la stratégie de numération arabe : fournir l’essentiel, juste ce que l’utilisateur a besoin ; ni plus, ni moins afin de créer la zone de convergence entre les objectifs de l’entreprise et les besoins réels des clients.
Le complexe du complexe en expérience client
Au petit jeu du « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? », un paquet d’entreprises sont passées maîtresses. Face à cette inflation de la complexité organisationnelle, s’ajoutant à celle galopante des technologies, il y a donc urgence à cultiver le réflexe de garder les choses simples, de préférer la numération arabe à la numération romaine.
Ce réflexe n° 8 s’attaque à fortes parties car il s’attaque aux croyances largement répandues dans l’univers de l’entreprise moderne : vouloir à tout prix ajouter des choses plutôt que d’en enlever. Non pas au bénéfice de l’expérience client mais pour se rassurer d’avoir le contrôle sur un monde imprévisible.
- Nos équipes ne suivent pas ? Ajoutons l’agilité.
- Nos collaborateurs ne sont pas engagés ? Créons une division « Bonheur au Travail » tellement tendance.
- Nos UX Designers ne génèrent pas de résultats business ? Parachutons de nouvelles techniques …
Pendant que les entreprises s’alourdissent de plus de produits, plus de ressources, plus de départements, plus de processus, plus de contrôle, … le client subit cette complication alors qu’il aspire surtout à de plus en plus de simplicité.
Il ne s’étonne même plus de ce triste spectacle conscient qu’on ne peut pas attendre de Sumos, à qui on ajoute sans cesse plus de poids, de faire une représentation de danse classique, faute d’agilité et/ou d’endurance à suivre un tempo sans cesse en accélération.
L’usage massif de ce qu’on pourrait qualifier de numération romaine additive a atteint un point tel que la citation de Peter Drucker, professeur en management d'entreprise, est plus vraie que jamais: « L’essentiel de ce qu’on appelle le management consiste à rendre plus difficile le travail devant être réalisé par les employés ».
Et comme le disait l’ancien CEO de General Electric, Jack Welch: « Quand la vitesse de changement hors de l’entreprise est plus rapide que le changement interne, la fin est proche ».
Comme déjà évoqué, vitesse et précipitation n’ont rien à voir l’une avec l’autre. Malgré ses légions d’experts en numération romaine, l’Empire Objet court à sa chute.
Pourtant, nom d’une quille, au début d’un projet, les choses sont souvent simples ! Le plus important est surtout qu’elles le restent. Ce qui en soi est … compliqué.
La parade est de savoir accepter et intégrer la complexité comme un composant naturel … sans compliquer les choses.
En utilisant un cadre de référence basée sur le comportement Humain et en se demandant en permanence : « Qu’est-ce qui est superflu ? Que puis-je enlever pour simplifier la vie de mon client ou le fonctionnement de mon organisation ? Ce que je suis occupé à concevoir est-il assez simple pour celui qui est en face de moi, que ce soit un client ou un collaborateur ? Quel est le comportement réel des personnes ? Que puis-je enlever ? Que puis-je simplifier ? »
Soyons clair, il ne s’agit pas ici de vous vendre ou vous chanter les mérites d’une expérience-puzzle de 500 pièces ramenée à une trame simpliste composée de 5 pauvres pièces ! La simplicité peut très bien vivre au niveau des pièces qui constituent un ensemble plus complexe, mais accessible à l’intelligence naturelle de par ce qui le constitue.
Expérience client, laudanum ou potion magique, mon Petibonum ?
Vous vous souvenez que l’équipe digitale monde du groupe de distribution de matériel électrique – notre exemple fétiche, nous avait demandé d’analyser son site français.
En plus d’avoir enregistré les données biométriques des électriciens réalisant des tâches sur le site, nous en avions profité pour analyser les composants utilisés dans les différentes pages du site grâce à Google Analytics, sorte de journal de bord des activités du site. Une mine d’enseignements !
La homepage du site e-commerce est intéressante à utiliser comme exemple pour analyser l’impact de l’application d’une numération romaine.
Sur la trentaine de composants constitutifs de la page d’accueil, 98% des comportements réels ne se réalisent que sur 2 zones ne couvrant que 5% de la surface de la page. Autrement dit, 95% des zones de la page d’accueil ne génèrent que 2% d’actions.
Imaginez le temps et le budget alloué aux 95% des zones n’étant pas utilisées dans la réalité !
La zone de publicités occupant 20% de l’espace visuel, qui ne génère que 0,002% des clics !
Nous étions face à des experts en numération romaine, ajoutant des composants soit à chaque nouvelle demande subjective des clients, soit parce que par suppositions, les experts se disaient entre-eux : « Et si on rajoutait des configurateurs ! Oh oui ça ce serait bien et intéressant pour les électriciens » . Coût de développement : énorme ; résultat business : 0,008% des usages. Ajouter à cela la vitesse, impossible à tenir car trop de projets, se transformant en précipitation.
Suite à une recherche de produits, dans la page de résultats, 80% des composants n’étaient pas utilisés par les électriciens.
Pire, le nombre de composants inutiles obligeaient les électriciens à prendre 2 fois plus de temps à trouver le produit dont ils avaient besoin pour leurs chantiers. Le but central de leur recherche.
Mais, c’est bien connu, les Romains n’ont jamais détenu la potion magique. Le druide Panoramix, bien ! A moins que ce ne soit Panoram-UX …
Expérience client — Réflexe 8. Garder les choses simples.
En ayant analysé l’expérience anticipée et l’expérience effective des clients pour cerner les comportements cibles, puis seulement concevoir les objets parfaitement aptes à générer ces comportements, les écrans seraient restés simples, les coûts de développement maîtrisés auraient pu être affectés à des choses essentielles permettant de générer une expérience client positive permettant d’aller vite, sans précipitation.
Si « Small is beautiful », « Simple » aussi. Garder les choses simples et faciles est une condition de l’efficacité réelle que doit offrir n’importe quelle entreprise. Encore plus au niveau de l’expérience client. Elle représente l’unique test quotidien qui vaille entre une entreprise et ses clients / utilisateurs. Réussir ce test est le seul ciment durable de l’indispensable zone de convergence à bâtir entre l’entreprise et eux.
Béatrice Grenade
Directrice Stratégie Digitale
« Des méthodes innovantes et efficaces »
Marc et son équipe nous ont accompagné lors de la refonte du site voyages-sncf.com avec une vision 100% client, des méthodes innovantes et efficaces.
Le site a gagné en performance et encore mieux, la note de satisfaction ainsi que le net promoter score ont été nettement accru !
Tout le monde peut participer à la conception d’expérience client positive en travaillant avec quelques bons réflexes.
Il s’agit bien plus d’un état d’esprit à retrouver en re-développant le savoir-être, avant le savoir ou le savoir-faire. Une fois cette culture initiée, les techniques prennent tout leur sens.
De mes missions de terrain durant plus de deux décennies, j’ai dégagé 9 réflexes que toute entreprise peut adopter pour gérer l'expérience client. Et cela, à son rythme, dans l’ordre qui lui convient, en fonction de ses besoins et capacités. Non pas pour faire d’un coup la révolution mais s’offrir les évolutions nécessaires menant à délivrer une expérience client digne de ce nom.
- Réflexe 1. Briser la vitre sans tain.
- Réflexe 2. Cultiver l’être, l’avoir suivra.
- Réflexe 3. Concevoir des comportements, pas des objets.
- Réflexe 4. Privilégier l’intelligence naturelle.
- Réflexe 5. Bannir les suppositions et les évidences.
- Réflexe 6. Viser la vitesse, pas la précipitation.
- Réflexe 7. Déconnecter coûts et attention.
- Réflexe 8. Garder les choses simples.
- Réflexe 9. Faire de son mieux, toujours.