En Design Comportemental, proie et prĂ©dateur restent les deux pĂŽles dĂ©terminants dans lâadoption des choix et comportements des utilisateurs. Thalamus et amygdales sont en permanence au taquet pour les identifier.
La notion duale « proie/prĂ©dateur » est traitĂ©e par le cerveau Ă©motionnel et plus particuliĂšrement le thalamus qui joue le rĂŽle de gare dâaiguillage. Tous les signaux provenant des organes sensoriels y font escale avant dâĂȘtre orientĂ©s vers dâautres zones cĂ©rĂ©brales.
En Design Comportemental, la vision tient dans le processus proie / prédateur un rÎle majeur.
Joseph LeDoux, professeur à la New York University, a modélisé ce mécanisme millénaire en un exemple baptisé « le serpent de LeDoux ».
- Un promeneur marche en forĂȘt lorsque son cerveau « voit » en vision pĂ©riphĂ©rique lâimage floue dâun bĂąton quâil prend pour un serpent.
- Le thalamus active les amygdales qui déclenchent à leur tour une réponse instantanée de sursaut et de recul. En parallÚle, le cerveau va mobiliser les yeux pour « regarder » les détails de la scÚne.
- Les infos recueillies sont envoyĂ©es au cortex visuel pour analyser lâimage en dĂ©tail. Sâil sâagit bien dâun vrai serpent, le thalamus booste lâeffet des amygdales et la rĂ©action de fuite sâen trouvera dĂ©cuplĂ©e.
- A contrario, si le cerveau conclut quâil sâagit dâun bĂąton, les manifestations physiques de peur vont sâestomper.
La fonction de filtrage entre proie et prédateur tenait un rÎle essentiel en contexte de survie et reste active dans notre quotidien.
Mieux vaut toujours prendre un bĂąton pour un serpent et agir plutĂŽt que le contraire. Transposons ce cas de figure en Design Comportemental.
- Revenu de sa balade, notre promeneur est Ă prĂ©sent devant son ordi pour sâinformer sur lâactu. Il consulte un site de news trĂšs populaire.
- ArrivĂ© sur la page dâaccueil du website, sây cĂŽtoient des articles sĂ©rieux traitant de deux chefs dâaccusation contre Donald Trump, de la rĂ©forme des retraites, de la pandĂ©mie qui force la Grande-Bretagne toute entiĂšre au confinement âŠ
- Mais aussi une dizaine de pavĂ©s affichant des promotions de « -25% sur la vente de pneus », des remises sur les « trottinettes Ă©lectriques noires Xiaomi », des pubs pour un « complexe dĂ©contractant musculaire en 30 comprimĂ©s »âŠ
- Que pensez-vous que son cerveau va faire ?
- Il estimera prĂ©fĂ©rable de « voir » une pub comme un prĂ©dateur et de la zapper plutĂŽt que de la « regarder » pour sâapercevoir trop tard que câĂ©tait bien un prĂ©dateur.
RĂ©flĂ©chissez bien, votre vĂ©cu quotidien fourmille dâun tas dâapplications de ce principe binaire dâattraction/rĂ©pulsion. Citez-moi le premier qui vous vient Ă lâesprit.
Conclusion
La faculté innée de distinguer entre les menaces et les opportunités, une relique de notre héritage évolutif, joue un rÎle crucial dans le quotidien et les comportements des clients / utilisateurs.
Le design comportemental, en s'appuyant sur ces mécanismes profondément ancrés, ouvre la voie à la création d'expériences utilisateur qui respectent et exploitent notre nature instinctive.
En adaptant nos apps, messages marketing, dialogue de vente pour refléter ces principes biologiques, nous pouvons non seulement faciliter des interactions plus naturelles et agréables mais aussi encourager des comportements positifs et réduire les frictions.
Voici quelques interrogations destinées à stimuler vos réflexions
Comment pouvez-vous utiliser la compréhension du mécanisme proie/prédateur pour créer des interfaces plus intuitives et sécurisantes pour les utilisateurs ? Pouvez-vous identifier des éléments de design qui sont réguliÚrement perçus comme des « prédateurs » par les utilisateurs ? Et comment trouver ce qu'ils considÚrent comme « proies » ?
De quelle maniÚre les insights sur la réaction rapide du cerveau face à des stimuli perçus comme menaçants peuvent-ils influencer votre approche de la recherche utilisateur ? Comment intégrer ces connaissances dans l'élaboration de questionnaires ou lors de l'observation des comportements utilisateurs pour mieux comprendre leurs réactions instinctives ?